L’Église catholique vit un moment particulier de son histoire. Comment le qualifiez-vous ?
L'église traverse une crise, mais elle en a traversé bien d'autres : outre les hérésies des premiers siècles, les fantaisies des Borgia & Co, la royauté de Droit Divin, … . Elle avait l'habitude de "diriger" un peuple peu instruit qui suivait les "élites" sans se poser trop de question : le contexte a changé … au moins dans les pays développés. L'église doit revenir à l'essentiel du message de Jésus et le reformuler dans des termes d'aujourd'hui en sortant d'un jargon rempli de royauté.
Quels événements de ces derniers mois vous ont particulièrement marqués ?
Les abus sexuels ne m'ont qu'à moitié surpris, mais le pape m'a ouvert les yeux sur le cléricalisme : bien que de tempérament sérieusement attaché à ma liberté, je n'en avais pas pris conscience … Il est vrai que les circonstances ont fait que je n'ai jamais connu et donc souffert de l'autoritarisme d'un curé.
Avez-vous le sentiment qu’il est difficile de se dire catholique en ce moment ?
Non ! C'est l'hypocrisie qui est rejetée.
Ces événements ont-ils changé votre regard sur l’Église, vos engagements, votre soutien ?
Non ! Si je veux que l'on accepte mes limites, je dois accepter les faiblesses des autres …
Ces événements ont-ils changé vos rapports avec les prêtres que vous connaissez, les évêques, le pape ?
Non. J'ai des nombreux ami(e)s moines ou moniales ainsi que quelques prêtres diocésains : je les connais assez pour continuer de leur faire confiance … raisonnablement, car je connais leurs limites … qui ressemblent aux miennes !
Dans cette période troublée, à quoi vous raccrochez-vous ?
A l'essentiel du message de Jésus : Dieu est Père dont émane de l'Amour et nous ressusciterons en continuant de vivre. L'église a rajouté beaucoup de stuc autour …
Avez-vous trouvé des lieux où vous pouvez parler avec d’autres de ce que vit l’Église actuellement ?
Oui. Essentiellement dans les forums de MOOC des Bernardins.
A quelle échelle, selon vous, est-il le plus urgent d’agir pour faire évoluer les structures et les fonctionnements de l’Église : au plan universel ? au plan diocésain ? au plan local ?
Aux trois en y rajoutant le niveau individuel par l'éducation certes au dogme ou à la doctrine, mais surtout au libre arbitre … éclairé !
Et vous, personnellement, que pouvez-vous faire pour contribuer à « réparer l’Église » ? avez-vous déjà commencé ?
Répondre à votre enquête (!) et aborder paisiblement le sujet des abus lorsque l'occasion se présente.
Quels sont les trois chantiers prioritaires, selon vous, pour l’Église ? Quelles propositions concrètes avez-vous déjà mises en place ou voudriez-vous mettre en œuvre pour « réparer » l’Église ?
Dégager la doctrine des fatras que l'histoire y a rajouté.
Considérer le peuple comme un ensemble de personnes responsables aussi lucides que le clergé.
Puiser dans les autres croyances ce qu'elles ont mieux perçues que nous.
Ce sont des tendances à long terme qui n'empêchent pas de soigner les abcès actuels.
Que voudriez-vous dire aux responsables de l’institution ecclésiale ?
Revenez au sens de l'Evangile et moins au décorticage des mots pour leur donner des significations extrapolées. Admettez que nombre de questions existentielles n'ont pas de réponse certaine : inutile d'essayer d'y répondre par un dogme (il n'y a pas d'amour sans respect de la liberté de l'autre) Dieu nous Aime, Il ne veut pas nous imposer sa vérité, Il doit nous laisser dans l'incertitude … ce qui ne nous empêche pas de forger des convictions … éventuellement très fortes.